GASTON: M’ ENFIN DE COURSE?

Bruxelles, 1957. Dessinateur-star du Journal de Spirou édité par Dupuis, André Franquin (1924-1997) signe depuis des années les planches dédiées à Spirou & Fantasio. Le Marsupilami, c’est lui. Seccotine aussi, Zorglub et Zantafio, le cousin maudit de Fantasio, encore lui. Sans oublier toutes les voitures traversant les bulles, avec mention particulière à la fameuse Turbo, amplement inspirée de la Grégoire à turbine 1952.

Passé à l’ennemi -le Journal de Tintin, en 1955, Franquin y restera quelques saisons, le temps d’y installer Modeste & Pompon. Puis retour au Journal de Spirou où apparut pour la première fois, le 28 février 1957, dans le numéro 985, un personnage nouveau, paresseux, mou, insoumis, rétif au travail et à l’autorité, allergique au bureau et totalement subversif : Gaston Lagaffe ! Au rythme d’un gag par semaine, Franquin partage sa planche avec Jidéhem et entoure son Gaston d’une galerie de personnages récurrents dont Mademoiselle Jeanne, Lebrac, Jules-de-chez-Smith-en-face, Aimé de Mesmaeker et ses fumeux contrats et naturellement Fantasio, car l’action a pour cadre les bureaux de Dupuis. Vêtu d’un chandail vert à col roulé, d’un jean’s 501 à revers, de chaussettes rouges et chaussé d’espadrilles jaunes, clope au bec (dès 1959), Lagaffe se laissera pousser les cheveux en 1963, endossera un duffle-coat camel informe, et chaussera des espadrilles bleues. En 1988, le pull deviendra infâme informe, nombril à l’air. Dans la vraie vie, Gaston est alors un prénom démodé, fêté le 6 février. Démodé mais bien porté : Gaston Bonheur, Gaston Deferre, Gaston Gallimard, Gaston Lenôtre, Gaston Leroux pour glorieux exemples. Le comique troupier Ouvrard se prénommait aussi Gaston. On en a la rate qui se dilate…En 1967, Nino Ferrer chantait Gaston y-a le téléfon qui son…et en 1973, Jean Gabin campera le granitique Gaston Dominici dans L’affaire Dominici.

Entre temps, en 1968, émancipé de la tutelle de Spirou & Fantasio, lequel est remplacé par Prunelle, Gaston Lagaffe évolue en solo, Franquin aussi. Sa signature est une source de micro-gag tandis que chaque case foisonne de détails, truffée de gags dans le gag. La mouette rieuse et le chat composent un bestiaire source d’avanies hilarantes. Gaston se politise, écolo avant l’heure, anti-militariste et anti-flic. Place ici à Longtarin, le contractuel irascible brûlant et crevant d’aligner le tacot bicolore de Gaston sous tous les prétextes et infractions possibles. La voiture de Gaston est un paradoxe : garçon de bureau, il est le seul employé à posséder une tuture, exception faite de Fantasio. Dès ses débuts, Franquin lui avait collé dans les mains une Citroën 5HP Torpédo Trèfle. Cinq ans plus tard, ce sera une Fiat 509. Les deux modèles sont des tacots, des guimbardes. La teuf-teuf de Gaston s’exprime d’ailleurs à grands coups de Bouf Bouf Bouf, Pott Pott, Reuhhhh, Rrrrrrââârrrr et autres Crââââhcrâââ. Noire et jaune, la voiture est adornée d’une bande à carreaux noir/blanc découpés dans les grilles de mots-croisés vierge du Journal de Spirou. Les roues sont voilées, tordues ; la machine carbure à tout ce qui pue, pollue et charbonne alentours. Au volant, Gaston conduit comme une savate, totalement distrait, irresponsable, se faufilant dans le trafic et sur les routes entre accidents et gags. Au fil des gags et des albums, Gaston roule aussi à moto, la fameuse Sapetoku, mais aussi en Ferrari à pédales, en kart. Excité comme une puce, il achètera un jour une superbe MGB blanche dont il n’a pas vu qu’elle était coupée en deux : il s’agissait d’un spécimen de démonstration dont le concessionnaire était trop heureux de se débarrasser ! Gaston Lagaffe dans Starter ? M’enfin ! Publiés entre 1960 et 1999, les 19 albums consacrés à Gaston ont été réédités, reformulés. Selon les ultimes volontés de Franquin, il était hors de question d’en prolonger la destinée sous le trait d’un autre dessinateur. Quand s’est profilée l’idée d’un nouvel album, sa fille, Isabelle Franquin, s’y est naturellement opposée, bloquant en justice le projet. Arbitré et réglé, le litige aboutira à un accord. Dessiné par le Québécois Marc Delafontaine, alias Delaf, Le retour de Lagaffe, ce 22ème album arrive sans doute un peu tard. Graphiquement réussi, il lui manque l’étincelle et la poésie qui mettaient les gags à feu. Toujours mieux que les adaptations ciné calamiteuses qui ont précédé, la pire étant Fais gaffe à Lagaffe, réalisée en 1981 par Paul Boujenah (le frère de Michel B.) avec Roger Mirmont dans le rôle-titre. Sans doute pour des raisons de droits, aucun personnage évoque les originaux : Mirmont joue G., Marie-Anne Chazel campe Pénélope (Mademoiselle Jeanne), Daniel Prévost y est Prunus (Prunelle) et Marco Perrin, Mercantillos (De Mesmaeker). La seconde adaptation, filmée en 2018 par Pierre-François Martin-Laval avec Théo Fernandez, s’avèrera plus fidèle en esprit et en style tout en démontrant que transférer une bédé au cinéma avec des acteurs en chair et zosses équivaut toujours à perdre des boulons en route. Hihihiâârh !!!!!!!!!!!! 

De gauche à droite

SIMCA PLEIN CIEL. 1957. NOREV . No. 18

Constructeur généraliste apparu avant-guerre et dirigé par le Turinois Henri-Théodore Pigozzi, pas encore naturalisé Français, la Société Industrielle de Mécanique et Carrosserie Automobile (SIMCA) s’est développée en produisant les clones des Fiat 500 Topolino et 508 C devenues en France Simca 5 et Simca 8. Deux autos populaires lancées au mitan des années 1930 et relancées après-guerre, non sans succès. Aspirant à se dégager -mais pas trop- de la tutelle de Fiat, Pigozzi présentera en 1951 la Simca 9 Aronde, voiture qui rencontrera très vite son public. Nouveau logo, nouveau concept, nouvelle image. Plusieurs fois modifiée pour aboutir dix ans plus tard à la P60, l’Aronde fera l’objet de variantes multiples : coach 2 portes baptisé Grand Large puis Monaco…, break de chasse Châtelaine, fourgonnettes Commerciale et Messagère, pick-up bâché Intendande…Rayon coupés et cabriolets, la Simca 9 Sport ouvrira le bal, carrossée par Facel-Metalon. Suivront le Coupé de Ville et le cabriolet Week-End, dessinés par Jean Daninos. Commercialisés en 1955 et 1956, ces deux autos produites à 2263 exemplaires seront remplacées en 1957 par un duo baptisé en tout illogisme : Plein Ciel (pour le coupé) et Océane (pour le cabrio). Avec ses faux airs de T-Bird, l’Océane vise alors une clientèle féminine. Forte d’une palette de couleurs suggestives -bleu Capri, vert Criquet, beige doré métallisé, rouge Torche… et dotée de quatre places, l’Océane sera retouchée au début des années 1960 sous une robe « Grand Carrossier ». Gros hic à l’époque : l’Océane coûtait deux fois plus cher d’une berline Aronde, et, c’est un comble, elle était plus chère que le cabriolet DS19, que le cabriolet Panhard 17 et que le cabrio Peugeot 403 ! Sérieusement concurrencée par la Renault Floride, moins onéreuse et plus pétillante, l’Océane cessera très vite de faire des vagues. C’est une Océane rouge bien démodée et propriété de son pote Lebrac que Gaston Lagaffe jettera sous les roues d’un autobus Costo, réduisant la voiture en purée, victime parmi tant d’autres d’un fou du volant en col roulé vert.

Sur le champ du 1/43ème, la doublette Plein Ciel+Océane occupa longtemps Norev. Mises au catalogue en 1957, vendues sous les références 18 et 19 dans les fameuses boîtes carton imitant des caisses en bois, les jumelles Simca en feront voir de toutes les couleurs : blanc ivoire, rouge torche, rose fuchsia, vert menthe, turquoise, orange…Réussie et pimpante, l’Océane Norev finira sa carrière derrière le Rideau de Fer, reproduites par Tbilissi.  Face à Norev, toujours en plastique, Minialuxe fera aussi rouler en 1957 le même duo sur deux échelles : 1/32 et 1/43 avec modèles promotionnels Pierval, Delespaul ou Chèque Tintin ; copie identique un an plus tard avec Clé au 1/48 et au 1/64, réservant au modèle 1/32 une boîte-garage en plastique. Il y aura aussi une Océane en céramique au 1/25 produite par le grand céramiste Pol Chambost. Quid du métal ? snobée par Dinky Toys qui préférait les Aronde berlines, l’Océane en zamac trouvera sa voie chez Solido en sa version 2 « Grand Carrossier », retouchée poupe et proue. Reproduite entre 1959 et 1963, inscrite dans la Série 100, ref. 110, l’Océane est un petit bijou proposé en plusieurs coloris, figurine féminine au volant et capote sagement repliée. Par la grâce de ses accords de partenariat avec l’Espagnol Dalia et avec le Danois Tekno, l’Océane voguera à l’étranger en gagnant des couleurs de robe supplémentaires. Voilà peu, l’éphémère Club Solido, rééditeur partiel de la Série 100, a livré une Océane vert céladon, no.5 dans un ordre vite interrompu.

PLYMOUTH FURY CABRIOLET CAPOTÉ. 1963. DINKY TOYS GB. No. 137

Fondée en 1928, fermée en 2001, Plymouth était la marque d’entrée du groupe Chrysler, rivale de Chevrolet (GM). Jusqu’au milieu des années 1950, les Plymouth roulaient benoîtement au milieu d’un parc automobile pléthorique. Et puis soudain, par effet de style, voici Plymouth entré en 1956 dans le rocket age avec des voitures démesurées, chargées de chromes dorés, d’ailerons délirants. Ainsi de la Fury, ex-version sport de la Belvedere avec un coupé sidéral vite hissé en haut-de-gamme via une gamme émancipée symbolisée en 1959 par la Sport Fury. Cinq générations plus tard, la Fury deviendra en 1979 Gran Fury, appellation valide jusqu’en 1988. Entre temps, en 1983, le réalisateur John Carpenter avait fait de la Plymouth Fury 58 une ciné-star culte avec le film d’épouvante Christine. Après quelques saisons de démence stylistique, la Fury s’assagit. Plus sage, plus carrée : dès 1962, la voiture se fait plus raisonnable. Idem pour la série suivante, conduite par Alain Delon dans Le cercle rouge, de Jean-Pierre Melville. C’est en revanche une Fury de 1963 que conduit Aimé De Mesmaeker, l’homme d’affaires aux contrats dont on ne saura jamais la teneur, victime expiatoire de Gaston Lagaffe. Apparu en 1960, De Mesmaeker aime les grosses belles voitures, si possible américaines, marqueur de sa réussite de businessman. Au fil des gags, on le verra au volant (ou pas) d’une De Soto Fireflite cabriolet 1957, d’une Ford Mustang 2+2 rouge 1964, d’une énorme Lincoln Continental Mk V de 1977 et aussi d’une Fiat 850 Spider Bertone 1967, en réalité tuture à sa fifille. Autant d’autos que Lagaffe saura réduira en miettes. Histoire de remettre les points sur les i, savoir que dans le film Duel, première réalisation cinéma de Steven Spielberg, la Plymouth conduite par Dennis Weaver est une Valiant et que la Plymouth de la série TV Rick Hunter est une Fury 1977.

Modèle nourricier de la Fury, la Belvedere eut au 1/43ème les honneurs du zamac en France chez CIJ et chez Dinky France, en version coupé. Chez Dinky GB, les Plymouth étaient en revanche monnaie courante avec le break Woody Special DeLuxe, la berline Plaza déclinée ville et taxi, la Fury des seventies Police et Taxi NYC et au détour des sixties, deux Fury des années 1962-64. L’une, sortie en 1963, no 137, proposée en version cabriolet capoté avec capsule en plastique amovible, capot ouvrant et plusieurs teintes de peintures : rose, vert mousse métal, bleu métallisé…L’autre, sortie en 1965, no. 115, proposée en version Fury Sports, cabriolet décapoté avec figurines conducteur/passagère, capot ouvrant et couleurs à minima. C’est ce modèle qui sera ensuite récupéré par l’Indien Nicky Toys (nonobstant une inversion de référence) déployé dans une gamme de couleurs chatoyantes : bleu ciel, jaune vanille, corail, bordeaux, jaune canari…Autrement, cette Fury-là fut aussi réduite au 1/24 en plastique par l’Américain Jo-Han à des fins promotionnelles. Quant au break Plymouth Sports Suburban reproduit par Corgi Toys, il relève de la gamme des Belvedere/Fury 1958…

MGC GT COMPETITION. CORGI TOYS. 1968. No.345

MG pour Morris Garage, ouvert par William Richard Morris et développé par Cecil Kimper, passionné de voitures sportives qui, dès 1923, adapta sur des châssis Morris des carrosseries décapotées à deux places, baptisées MG. Ainsi fut mise au point la fameuse Midget, lancée en 1929. Suivront la Magnette, les TB, TC, TD, TF et la MGA qui se vendra à plus de 100.000 exemplaires jusqu’en 1962. Les sixties marqueront l’apogée de MG avec la nouvelle Midget MkII, cousine de la Austin-Healey Sprite ou encore la petite berline MG 1100, jumelle des Morris et Austin 1100. Succédant à la MGA, la MGB, produite de 1962 jusqu’en 1980 en différentes versions, sera la sports car la plus vendue de tous les temps, jusqu’à ce que la Mazda Miata MX-5 ne la déloge du palmarès. Au cabriolet viendra en effet s’ajouter en 1965 le coupé GT, profilé fastback par Pininfarina, ce qui déclencha un flot de critiques et controverses, la MGB GT cassera la baraque. Il faut dire que cet embourgeoisement correspondait à une montée en gamme notable imbriquée à celle du pouvoir d’achat et des exigences de confort qui, désormais, oblitèrent le concept-même de joujou-chic rustique En 1967, le coupé MGC GT sera mal reçu et sortira de la gamme deux ans plus tard. Un accident industriel pour MG Division of BMC, entité formée cette même année 1967 au sein du groupe. Las, un an plus tard, la fusion de BMC avec le groupe Leyland viendra contrarier ce statut sans influer en rien sur le succès commercial des MG, vendues à gogo en Europe comme aux USA. Ainsi de la MGB avec plus de 523.000 exemplaires ! Au cinéma, on vit la MGB rouler dans Two for the Road (Voyage à deux ; 1967), la comédie douce-amère avec Audrey Hepburn et Albert Finney pour passagers. Quelques années plus tard, toujours commercialisée avec succès, notamment aux USA, une MGB figurait dans The Omega Man (Le survivant ; 1973) avec Charlton Heston. Le film fit alors scandale à cause d’un baiser échangé entre un blanc (Charlton) et une noire, l’actrice Rosalind Cash. Sur le papier imprimé du Journal de Spirou, si les MG sont généralement pilotées avec enthousiasme par la rubrique Starter dessinée par Jidéhem., la MGB lui fera se tordre le nez devant cet avatar destiné à des « clients plus très jeunes », qualifiée de voiture de sport à tout faire et qui déplore une poupe trop identifiée à Pininfarina, cf.ici l’Austin A40… Quant à notre Gaston gaffeur, c’est une MGB blanche qu’il acquiert à vil prix sans s’être aperçu que le modèle exposé était en fait coupé en deux à des fins démonstratives. Gag suprême, MG’enfin !.  

Orgueil anglais par essence, MG fut l’une des marques préférées des fabricants de « little voitures » en Perfide Albion. Dinky Toys par droit d’aînesse, évidemment avec la MG Midget, produite entre 1955 et 1959 et multipliée par trois avec la Midget Touring, la Midget Sports, sans oublier la Midget prévue pour le marché américain. Vexé de constater que Spot-On, Tekno et Micro Models ont jeté leur dévolu sur la nouvelle MGA, la firme de Liverpool rongera son frein jusqu’en 1962 avec le lancement d’une MGB spider/roadster décapoté. Face à Dinky, son nouveau rival, Corgi Toys a lui aussi mis en 1957 une MGA à son catalogue. Dix ans plus tard, Corgi sera l’unique fabricant de petites voitures à reproduire la MGB GT, petit coupé fastback 2+2 avec portes et hayon arrière ouvrants, roues rayons zamac, phares diamants et dans le coffre, une valise en plastique (no. 327). Survitaminée et surnommée l’Aston-Martin du pauvre, la MGB GT sera fissa doublé par une MGC GT, présentée en 1968, mais dont la carrière sera celle d’une étoile filante. Corgi en profita néanmoins pour adapter son MGB GT en MGC GT Competition, traitée en livrée bicolore -jaune/noir ou rouge/noir, ou unie orange, et différenciée par le bossage de son capot. La MGC sera ensuite adaptée aux nouveaux standards de vitesse avec les roues rapides Whizzwheels. Par la suite, Corgi reviendra en toute laideur à MG avec une Maestro 1600 au 1/36 dotée de phares et feux arrière lumineux. Au tournant des années 1990, la MGB refera un tour de piste au 1/43è dans le cadre de la collection labélisée Dinky Toys/Matchbox fabriquée en Chine avec la fameuse MGB GT V6 de 1973 à moteur Rover, déclinée en deux versions : rouge ou bleue avec toit ouvrant capoté.

CITROËN 5HP “TRÈFLE”. NOREV. 1958. No. 46

À la fin des années 1950, la mode des autos miniatures passe par le tacot, la guimbarde d’avant-guerre, l’old timer de l’entre-deux-guerres. Un film anglais en a lancé la vogue : Genevieve, comédie déjantée réalisée en 1953 par Henry Cornelius avec Kenneth More, John Gregson, Dinah Sheridan et la délicieuse Kay Kendall. Genevieve était une voiture, une Darracq de 1904, lancée dans une course de vétérans à quatre roues. Le film fit un tabac, inaugurant un ciné-genre prolifique où, une décennie durant, se bousculeront sur la ligne de départ des bobines du calibre de The Great Race (La grande course autour du monde) menée en 1965 à train d’enfer par Blake Edwards avec Tony Curtis, Natalie Wood, Jack Lemmon et Peter Falk ou, en 1969, toujours avec Tony Curtis, une co-production anglo-franco-italienne exploitée aux USA sous le titre Those Daring Young Men in Their Jaunty Jalopies, en Angleterre sous celui de Monte Carlo or Bust et en France sous celui de Gonflés à bloc !. Bousculade de stars sous la férule du réalisateur anglais Ken Annakin avec Bourvil, Walter Chiari, Mireille Darc, Gert Fröbe, Marie Dubois, Dudley Moore. Quant aux Jalopies de la VO , ce sont des tacots participants à l’un des premiers rallyes de Monte-Carlo.

Rayon jouets à l’échelle 1/43, plus destinés à une collection mise sous vitrine qu’à rouler sur le tapis du salon, les tacots occupent le terrain en couvrant un rayon allant du grand luxe aux cadeaux Huilor ou Bonux produits par Clé. Grand luxe avec l’Italien Rio, fondé en 1962 et ses modèles sophistiqués et riches de détails, des années 1900 à 1930. Un cran moins « orfèvre », la série Âge d’Or de Solido, initiée en 1964 mise sur les modèles de prestige de l’entre-deux-guerres. Six ans plus tôt, en 1958, la firme française JMK avait lançé la Rami, pour Rétrospective Automobiles Miniatures, collection de tacots en zamac réalisés artisanalement et forte d’une quarantaine de modèles allant de La Mancelle d’Amédée Bollée jusqu’à l’Hispano-Suiza de 1934. À ce titre, le message était clair : destinés aux adultes, les Rami ne sont pas des jouets. Cette même année 1959, la firme française Safir proposait une ligne de tacots en plastique truffés de détails rapportés et de fait assez fragiles. Idem pour Minialuxe entré dans la danse à l’orée des années 1960. Chez Norev, le premier essai de rétrovision fut opéré entre 1958 et 1960 avec la Citroën 5CV de 1923, dite « Trèfle. Il s’agissait d’un ballon d’essai inscrit dans le cadre du concours Grand Rallye Norev et visant à concurrencer les tacots Safir. Le Trèfle de la Citroën était diffusé à l’origine dans une boîte-écrin en plastique transparent fichée sur un socle en plastique vert, et se posait en modèle de collection plus qu’un jouet. Ce qui explique que tant d’exemplaires aient survécu sans dommages aujourd’hui. Prototype de la série Moyen-Âge lancée au milieu des années 1960 avec une gamme d’ancêtres de l’entre-deux-guerres (Traction 11 CV, Juvaquatre, Rosalie, Peugeot 201, Mercedes SSK, Simca 5 et 8…), la Trèfle de Norev rivalisait avec celle en zamac de Rami, diffusée dès 1958 sous le nom de Citroën 5 HP Torpedo, peinte en jaune citron et no.4 dans la gamme. En vrai, à l’échelle 1, la 5HP fut un succès commercial avéré. Seconde auto conçue par André Citroën pour être usinée en grande série selon la théorie fordiste, la 5HP était vendue 8500 Francs avec formule de crédit inédite. Dépassant guère le 60km/h, cette torpédo fut produite à 81.000 exemplaires. Carrosserie en tôle fixée sur structure en bois, c’est le cabriolet 3 places qui lui vaudra son surnom de Trèfle , voire « cul de poule » en raison de sa poupe en pointe. Ciblant une clientèle féminine, la « petite Citron » était essentiellement proposée en jaune pamplemousse. Couleur identique pour la version Jouets Citroën en tôle dont la production en 1/10ème avait été concédée sous forme de partenariat au fabricant CIJ. Fabriqués en totale exclusivité, diffusés par les concessionnaires Citroën jusqu’à ce que la faillite du constructeur et sa reprise en 1934 par Michelin y mettent un point final. Entre les années 1920 et les années 1970, la Trèfle ne disparut en rien du paysage ludique. Outre les Norev, Rami et Désormeaux au 1/43ème, on débusque un « cul de poule » réduit au 1/32ème par Les Plastiques Ouvrés dans la série Les Vieux Tacots. Sinon, il y eut une superbe version téléguidée estampillée France Jouets reprise ensuite en tôle et plastique par Marco Fance, et une version stylisée en bois laqué chez Vilac dessinée dans les années 1970 par Michel Aroutcheff. Plus récentes, la maquette au 1/24 chez Heller et les reprises du moule Norev par Éligor avec torpédo capoté ou décapoté et fourgonnettes publicitaires… Autrement, exception faite d’une Fiat Gaston chez Rio, le registre a glissé vers les figurines de collection en résine, métal, plastique et même sous forme de tirelire ! Deux références ici obligées : Leblon-Delienne et Pixi…

Savoir ici que cette Citroën si populaire fut la première voiture attribuée en 1962 par Franquin à Gaston Lagaffe avant que la Fiat 509 l’envoie à la ferraille. Carrosserie jaune et noir, la Fiat a totalement effacé le souvenir de la Citron originelle, elle aussi jaune avec ailes noires et capote rapiécée à la clé. Produite à Turin entre 1925 et 1929 à 92.500 unités, la Fiat 509 était déclinée en plusieurs carrosseries et fut la première voiture italienne à remporter le Rallye de Monte-Carlo en 1928. Noter que la 509, petite cylindrée de grande série, ne doit pas être confondue avec la 508, plus connue sous le nom de Balilla. En 1977, publié en Italie, La fantastica Fiat 509 di Gaston Lagaffe, quasi introuvable aujourd’hui, enfoncera le clou du mythe.