MORT SUR L’O’NEAL

Sale temps pour les stars de notre jeunesse. Voilà quelques semaines, David Soul, co-star de la série Starsky & Hutch et crooner occasionnel filait manger les pissenlits par la racine. Quelques jours auparavant, l’acteur Ryan O’ Neal basculait dans l’annuaire des ad patres.Sur le terrain, il y avait beau jeu que l’idole des seventies était devenu un has-been, sa carrière loin derrière lui. En son temps, le gaillard disputait au gotha hollywoodien son rang de star.

Rival de Burt Reynolds et de Robert Redford, disputant à Warren Beatty son rôle de serial tombeur d’actrices célèbres, Ryan O’ Neal (1941-2023) fut en effet marié à Joanna Moore, à Leigh Taylor-Young et vécut une longue histoire avec Farrah Fawcett. Avec Moore, il eut plusieurs rejetons dont Griffin et Tatum, enfants-stars ayant connu aussi leur heure de gloire. Il avait aussi un frère, Kevin, comédien et scénariste. Irlandais bon teint, O’ Neal vécut une existence jalonnée de triomphes, de bides, de flirts tapageurs, de disputes familiales et autres joyeusetés ayant nourri la machine à scandales. Boxeur à ses débuts, il s’est fait connaître grâce à la série Peyton Place où il incarnait Rodney Harrington. Adapté du roman de Grace Metalious, super-giga best-seller en son temps, Peyton Place avait déjà été porté au cinéma en 1957 avec Lana Turner dans le rôle de Constance Mac Kenzie. Intitulé en France Les plaisirs de l’enfer, le film avait fait un tabac. Son transfert en mode feuilleton du soir à la télé aura le même impact. Diffusé entre 1964 et 1969 – dix ans plus tard en France, Peyton Place embarquait un générique de jeunes acteurs, tous futures stars de cinéma. Ainsi de Mia Farrow et de Ryan O’Neal, présent dans 501 épisodes (la série en comptait 514). Dans la peau d’Allison Mac Kenzie, Mia Farrow quittera la série en 1966. Âgée de 21 ans, elle venait de se marier avec Frank Sinatra, 50 ans, qui lui interdira de tourner ensuite Rosemary’s Baby. S’ensuivra un divorce retentissant. Sur le set de Peyton Place, l’actrice fut remplacée par la splendide Leigh Taylor-Young, ex-model, que l’on verra ensuite dans Les Cavaliers, d’après Kessel, avec Omar Sharif et dans Soleil Vert, avec Charlton Heston. Présente dans 71 épisodes de la série entre 1966 et 1967, elle trouvera le temps d’épouser son partenaire Ryan O’ Neal dont elle divorcera en 1974 avant de se remarier au moins trois fois.

À l’écran, Peyton Place est si populaire que le tout-Hollywood s’y bouscula pour en être. Derrière Dorothy Malone, la star du feuilleton, il y avait Barbara Parkins, Leslie Nielsen, Gena Rowlands, Lee Grant, Barbara Rush…En 1969, tous sortirent essorés par ce succès fleuve. Ryan O’ Neal tournera le dos à la télé. Le cinéma lui fait du gringue. La Paramount qui a acheté les droits de Love Story, le roman d’Erich Segal, en prépare le tournage. Alors tout puissant, le producteur Bob Evans impose dans le rôle féminin sa jeune protégée, Ali Mac Graw, par ailleurs sa troisième femme -il en aura une demi-douzaine. Pour jouer le héros, Oliver Barrett, la production teste Beau Bridges ( frère de Jeff), Michael Douglas, Christopher Walken, Michael York, Jon Voight. Au grand dam du réalisateur Arthur Hiller, ce sera Ryan O’ Neal ou rien. Bingo. Love Story fera un carton phénoménal. Succès mondial sur toute la ligne, soutenu par la BOF signée Francis Lai entrelardée de morceaux de Bach et de Mozart. O’ Neal sera nommé aux Oscars. Il ne l’aura pas : c’est George C. Scott pour Patton qui le coiffe au poteau.

Les propositions de films abondent. Peter Bodganovitch le réclame à cors et à cri. Ils feront plusieurs films ensemble : What’s Up Doc ? avec Barbra Streisand, Le Voleur qui vient dîner avec Jacqueline Bisset, et aussi Paper Moon et Nickelodeon où il partagera l’affiche avec sa fille Tatum O’Neal. Certains projets capotent. Pour exemples, Out of Africa, dirigé par Nicholas Roeg, avec Julie Christie, ou The Body Guard, filmé par John Boorman, avec Diana Ross. On sait comment cela a fini. En 1978, la carrière de Ryan O’Neal est à son zénith. Sorti trois ans plus tôt, Barry Lyndon, de Stanley Kubrick, éreinté par la critique et boudé par le public, n’a pas écorné son aura. Quoi qu’il fasse et qu’il tourne, il demeure le Oliver Barrett de Love Story, le plus romantique des héros de la décennie. À tel point qu’il accepte d’en tourner la suite, Oliver’s Story, avec Candice Bergen pour co-star. Cette fois ci, O’Neal empoche 3 millions de dollars (il avait été payé seulement 25.000$ pour Love Story), mais le script remanié à l’envi accouchera d’un flop. Cette même année 1978, l’acteur donne son OK pour un polar noir qu’il dira e ensuite avoir regretté de tourner : The Driver. Aux manettes, Walter Hill (à ne pas confondre avec le Arthur Hiller de Love Story !). Co-produit par la Fox et la firme musicale anglaise EMI qui affichait alors des ambitions cinématographiques mirifiques, The Driver avait été refusé par Steve Mac Queen qui pourtant connaissait fort bien Hill, auparavant réalisateur seconde équipe de L’Affaire Thomas Crown et de Bullitt et aussi scénariste de Guet-apens. Après Le Bagarreur avec Charles Bronson, The Driver est le second film dirigé par Hill qui fera salle comble quelques années plus tard avec 48 Hours. En attendant, The Driver, entièrement tourné en extérieurs à Los Angeles, se prendra une volée de bois vert par la critique US. Mieux reçu et perçu en Europe, et notamment en France, son cachet « L.A. Pulp Noir » lui sera décerné bien plus tard. Référé à Jean-Pierre Melville, The Driver est évidemment un film de bagnoles. Si possible volées par le héros, sorte de détective-chauffeur obéissant aux ordres émis par une femme mystérieuse. Le personnage joué par O’ Neal ne porte pas de nom. Il est juste «  le chauffeur », tout comme Bruce Dern y est « le détective » et Isabelle Adjani, « la joueuse ». Un premier film américain pour l’actrice française lancée à Hollywood comme « The New Garbo ». Un slogan éculé appliqué à toutes les actrices européennes venues tourner aux USA depuis la retraite de la vraie Garbo. Juste avant Adjani, Dominique Sanda avait eu droit au même traitement. Pour des nèfles : après Le piège (1973) filmé par John Huston et après Les survivants de la fin du monde (Damnation Alley) big nanar s’il en fut, la Sanda revint dare-dare en Italie ajouter à sa belle filmo quelques chefs d’œuvre supplémentaires. Retour au Driver : chérubin mutique, chemise col pelle à tarte amplement ouvert sur poitrail velu, O’ Neal conduit une flopée de tutures dont la fameuse Pontiac Firebird III marron chocolat bien visible sur l’affiche du film. En ouverture, il pilote une Ford Galaxie bleue de 1974 poursuivie par une palanquée de police cars qui finiront en purée. Au tournant d’une scène en extérieur-nuit, on notera la présence d’un break Peugeot 404 sagement garé. Il y aussi cette flamboyante Mercedes-Benz 280 S orange pumpkin-pie qu’il amochera salement dans un parking en sous-sol. Et encore ce pick-up Chevrolet C-10 rouge vif impliqué dans une course poursuite haletante. Bref, The Driver casse de la tire à gogo. En vieillissant, le film s’est bonifié, jusqu’à se hisser au statut de cult-movie. Pour preuve, sa ressortie en salles en novembre 2022, saluée par une salve de critiques enthousiastes. Las, Ryan O’ Neal n’en aura pas profité. Avec une carrière dans les choux depuis le mitan des années 1980 et une belle brochette de navets à la clé, la star repassera par la case TV pour ne pas se faire oublier. On le verra dans quelques épisodes de la série Bones et aussi dans Desperate Housewives. Sa réconciliation officielle avec sa fille Tatum, après 25 années de fâcherie, fera l’objet d’un show TV piloté par Oprah Winfrey. Enfin, il arrive que l’on confonde encore Ryan O’Neal avec Ron O’Neal, acteur rendu célèbre dans les seventies par le film Superfly, fleuron du filon Blaxploitation (Shaft, Coffy la panthère noire de Harlem, The Mack…). Un autre genre que celui de Love Story, voyez-vous…

DE GAUCHE À DROITE

PLYMOUTH GRAN FURY POLICE CAR. 1979. MATCHBOX KING SIZE. No. K-78

On a déjà glosé ici récemment à propos de la Fury, blaze emphatique et rageur donné dans les années 1950 à la version sport de la Plymouth Belvedere et qui roulera haut et fort jusqu’en 1988 et couvrant cinq générations de voitures, non sans prendre du galon en devenant Gran Fury. Sur le terrain, ces Gran Fury étaient des grosses berlines (sedan) full-size, assez carrées, presque banales. La première série, produite entre 1975 et 1979 était déclinée en coupé, break Suburban et brougham. La berline de base sera fournie par flottes entières à la police. C’est ce modèle millésimé 1979 que Matchbox réduira au 1/36ème en déclinant deux versions : le taxi jaune NYC ( no. K-79) et la voiture de police bicolore. Versée dans la série des King Size initiée en 1962, cette Gran Fury n’avait plus la finesse des premiers modèles King Size au 1/43è (Dodge Charger, Lamborghini Miura, Mercury Cougar et Commuter, Binz Ambulance…) : mastoc, alourdie, enlaidie par des roues rapides, elle faisait concurrence à ces titres ) à la Chevrolet Caprice Police de Majorette, autre laideron patenté de l’époque. De fait, cette échelle un brin bâtarde pour Matchbox n’avait pour but que de tailler des croupières à Corgi et à Dinky avec leurs nouvelles séries au 1/36ème. Avec la Gran Fury, Matchbox roulait en effet sur les plates-bandes de Dinky qui avait aussi une Gran Fury 77 en catalogue.

MERCEDES-BENZ 220 SE. 1961. NOREV. No. 49

Ce fut la plus grande et luxueuse berline allemande du début des années 1960. Bardée de chrome et flanquée d’ailerons arrière discrets (Heckflosse), la Mercedes-Benz 220 SE en imposait et par son volume et par ses prestations mécaniques et esthétiques. Haut-de-gamme bientôt coiffé par la superlative 600, la 220 SE fut présentée en juillet 1959. Avec sa jumelle, la 190, plus sobre et reconnaissable à ses phares ronds, elle se vendra à presqu’un million d’exemplaires. Six cylindres sous le capot, design dû au Français Paul Bracq, confort absolu : la 220 SE règne alors sur le monde automobile européen. Aucune rivale dans le rétroviseur. La grosse Opel Kapitän ne lui arrive pas à la jante. Idem pour la Borgward P100. Chez BMW, l’imposante limousine 501 est déjà d’un autre âge. À l’étranger, rien à craindre des françaises. Ni des italiennes, exceptions faites de l’Alfa-Romeo 2600 et de la Lancia Flaminia. Seule concurrente en vue et venue d’Angleterre : la Jaguar Mk10. C’est dire si la 220 SE cartonne auprès d’une clientèle aisée et statutaire. L’image de la voiture est si forte que tous les fabricants de jouets et de miniatures autos se mettent sur les rangs, nonobstant des fortunes diverses : celle de Dinky GB, trop petite, semble provenir du moule Gama Mini ; celle de Politoys au 1/42 en plastique finira chez le Tchèque KDN. En raison de leur échelle hasardeuse, la 220 de l’Italien Ingap et celle de l’Espagnol Comando/Vercor sont hors-jeu. En revanche, les 220 SE réduites au 1/43ème par le Danois Tekno, par le Français JRD et par le Japonais Cherrica Phenix (ensuite KK Sakura) sont des plus réussies. Dans leur sillage, celle de Norev est également remarquable. Commercialisée en 1961, la miniature est suggestive, d’autant que son étoile sur la calandre, évidemment fragile, est impeccablement reproduite. Aucun ouvrant mais une nouveauté : la servo-direction. En clair : le train avant directionnel par simple poussée d’un doigt sur le capot. Certes, l’axe de virage n’est pas idéal, mais ça modernise sacrément le jouet. Avec ses pneus à flancs-blancs, la 220 SE roule et tourne à droite, à gauche, à l’instar de la DS 19, de la 2CV, de la Renault Ondine, de la 404 ou de la Floride. Si la servo-direction n’ira pas loin, la 220 SE fera une longue carrière chez Norev. Quand bien même best-seller et « remplacée » par la splendide 250 SE, la 220 sera vendue jusqu’au mitan des années 1980, mutée en Taxi-Radio, avec roues Speed Run et plastique dur Plastigam, version aujourd’hui traquée (et trafiquée) par les collectionneurs.

Quant à la 280 S démolie par Ryan O’ Neal dans The Driver, elle ne fut jamais en son temps reproduite au 1/43, Dinky GB, Norev, Märklin, le Belge Sablon et l’Espagnol Nacoral/Chiqui Cars s’ étant arrêtés à la 250 SE….

CHEVROLET CAMARO COUPÉ. SABRA-CRAGSTAN/GAMDA-KOOR. No. 8120

Au début des années 1960, Chevrolet parade avec sa Corvette, voiture de sport iconique taraudée par la Ford Thunderbird. Ford qui frappe un grand coup en 1964 avec le lancement fracassant de la Mustang. Le petit monde de l’auto parle alors de Pony Cars, nouveau segment remuant dont on fixe le modèle fondateur, en l’occurrence, la Plymouth Barracuda. Chez GM, on piaffe. La riposte s’impose. Aux orties le projet de « gonfler » la Chevrolet Corvair Monza. Il faut du nouveau, du nerveux. D’autant que les concurrents tiennent la corde. Dévoilée en 1966, la Camaro suscite l’évènement. Coupé facilement convertible en cabrio, élégant, un cran moins agressif que la Mustang déjà restylée, silhouette râblée, bientôt gonflée par des moteurs V8 plus puissants, la Camaro profile sa jumelle, la nouvelle Pontiac Firebird. Et donne son sens aux Muscle Cars qui ne sont pas autre chose que des Pony Cars stéroïdés. Comme la Camaro ne passe pas inaperçue, les industriels de la petite voiture en captent illico le potentiel ludique. Corgi Toys sera le premier à mettre une Camaro en jeu : sortie en 1969, son cabriolet capoté est une version SS 350. SS pour Super Sport avec phares escamotables, roues amovibles par système Golden Jacks et carrosserie peinte vieil or. Glamour. La seconde série, peinte en bleu avec capote blanche sera équipée de roues Whizzwheels. Un an plus tard, la firme israëlo-américaine Sabra-Cragstan ajoute à sa gamme Detroit Senior un coupé Camaro SS peint métallisé, capot et coffre noir mat, portes ouvrantes. Introduite sur les marchés nord-américain et européen à la charnière des années 1960/1970 sous label Gamda Koor, cette collection de voitures US (exception faite d’une VW Cox) au 1/43ème s’avère inédite en son genre. Entre 1969 et 1972, pas moins de 24 modèles de Buick, Pontiac, Dodge, Cadillac, Chrysler, Ford, Plymouth, Oldsmobile et Chevrolet sont vendus dans des boites-garage en plastique dur transparent avec portail d’ouverture en plastique coloré. Aux modèles civils s’ajoutent des versions taxi, police, pompiers, ONU et militaires israëliens. De toutes les marques, c’est Chevrolet la mieux servie avec, outre la Camaro, il y a là une Chevelle break et pick-up, un coupé Corvair, une Corvette Sting Ray et une Impala…Si, d’avis d’observateurs avisés, les Sabra ne sortent pas de moules récupérés çà et là comme ce le fut aux origines de la marque avec les vieux moules de l’Anglais DCMT (Daimler Conquest, Buick coupé…), il s’avère évident que certains d’entre eux, une fois leur trajet achevé, furent cédés à l’Espagnol Nacoral : il existe en effet une Camaro SS coupé dans la série métal Inter-Cars fort similaire, si ce n’est son capot ouvrant. Idem à propos de la Ford Thunderbird 69 et de la Corvette Sting Ray…

Une enquête est en cours…

PLYMOUTH GRAN FURY POLICE. 1977 DINKY GB. No. 244

Les Plymouth, Dinky, ça le connait. Un bail que Liverpool en reproduit les modèles depuis les fifties et les sixties. Pourtant, entre le cabriolet Fury Sports de 1965 et la Gran Fury de 1977, rien, nothing, ze big vide. Rayon américaines, Dinky GB aura préféré mettre au catalogue une Cadillac Eldorado, une Pontiac Parisienne, une Chevrolet Corvette Sting Ray, une Lincoln Continental MkIV, une Mercury Cougar, sans oublier la petite série des belles américaines made-in-Hong-Kong. De fait, la Gran Fury ressemble à un chant du cygne. Apparue en 1977 au catalogue, elle y était proposée en version taxi Yellow Cab (no. 278), en version Police Car et en version Stock Car, plus réjouissante (no. 201). Son échelle la rapproche d’une série de camions, de véhicules militaires, d’engins agricoles ou de chantier, et aussi de voitures comme la Rover 3500, la Princess 2200, la Volvo 265, le London taxi ou le Beach Buggy. Comparable aux Corgi Toys de la même échelle, cette gamme se mélangea dès 1975 avec les reliquats de la génération 1/43 (Ford Escort, Mercedes 600, Range Rover…), les véhicules issus des séries TV comme Space :1999, Thunderbirds, Joe 90, Captain Scarlett et même La Panthère Rose, et l’éphémère série Dinky 1:25 qui restera sans suite après seulement trois variations autour de la Ford Capri (ville, rallye et police). À la différence de la Matchbox, la Gran Fury de Dinky est plus finement réalisée. Moule, gravure, ouvrants, décors : l’ensemble tenait la route. Pas pour longtemps. La firme fondée en 1934 par Frank Hornby fermera ses portes en 1979.