SKI IS THE LIMIT

La question n’est plus y aura-t-il de la neige à Noël ?, mais y aura-t-il des skieurs sur la neige ?. Jean Castex ayant prohibé la remise en marche des remontées mécaniques, la covidie ambiante condamne la montagne à être regardée de loin. Préférer la luge, les raquettes et les après-skis en poulain entre deux chocolats brûlants, trois gaufres-crème de marrons, cinq vins brûlés et dix grains de caviar : cette année, le Mont-Blanc restera dans les assiettes à dessert. Et le Canigou dans la gamelle de Médor. Une première, cruelle, dans l’histoire des sports d’hiver, pratique saisonnière popularisée pendant les Trente Glorieuses sous l’égide de l’État dans le cadre du fameux Plan Neige, lancé en 1964 et fini dans la poudreuse à la fin des années soixante-dix.

Ce plan ambitionnait de hisser en altitude un « concept de stations très fonctionnelles, au service du ski, fondées sur un urbanisme vertical ». Le but, par deçà les vacances à la neige des Français, enchantés de rentrer en ville avec un bras ou une jambe plâtrés, visait à rameuter une clientèle étrangère en Moon Boots supposée se délester de ses devises devant une fondue au fil dentaire.

À l’instar des vacances bleu-mer à la Grande Motte, la semaine blanche à la neige est alors érigée en droit au loisir absolu. Oubliés les jolis chalets, les hôtels de luxe comme dans La Panthère Rose : les sports d’hiver hier réservés aux privilégiés et aux mondains vont basculer dans une dimension industrielle telle que raillée dans Les Bronzés font du ski, tourné à Val d’Isère. Pour accéder à ces vingt stations nouvelles urbanisées, construites et décorées par le gotha de l’architecture et du design – Charlotte Perriand aux Arcs, Marcel Breuer à Flaine ou Michel Bezançon et Pierre Guariche à La Plagne-, il n’y a que la route de montagne, déneigée, pour en faciliter l’usage. Et pour garer les centaines de voitures affluant sur zone, on a étalé des parkings. En vingt ans, le paysage sera passé du traineau à la file de voitures à la traîne. Aveuglante sur les cimes, en station, la neige était sale. Rien à voir avec le film du même titre tiré du roman de Simenon. Les immeubles en béton alors construits ont été depuis mutés en Patrimoine architectural du XXème siècle. De La Plagne aux Ménuires, de l’Alpe d’Huez aux Deux-Alpes, d’Isola 2000 à Super Dévoluy, de Tignes aux Orres, le brutalisme montagnard est devenu un jalon du style. Voire. Car certaines stations sont passées par les trous de la raquette du Plan Neige, stoppé en 1977 par Valéry Giscard d’Estaing, soucieux de respecter un peu mieux et la nature et la montagne. Avec son Festival du Film Fantastique lancé en 1973, Avoriaz, vingt ans durant, transformera les pistes en bande-annonce pour un Shining putatif avec palanquées de semi-vedettes et people télé bras-cassés en combinaison fluo Killy. Y furent tout de même primés Duel, Soleil Vert, Phantom of the Paradise, Carrie au bal du diable… Dans ces mêmes années 1970, Méribel qui devait son cachet chic people à l’architecte Paul-Jacques Grillo, lequel y avait ébauché ses projets dès le milieu des années 1930, était sévèrement concurrencée par Morzine. Pour faire sa pub, qui de mieux que Nicole Nobody ?. Ex-productrice télé sous le nom de Nicole Millinaire, devenue par mariage duchesse de Bedford, la Nobody publiait alors un tas de bouquins qui se vendaient comme des petits pains. En tête : sa propre autobiographie, parue en 1974. VIP majeur du moment, c’est Nicole Nobody qui fera la réclame en lançant un slogan imparable : « À Méribel, la vie est belle ! ». Pas foulés les pubards. Quant à Courchevel, éternelle rivale des neiges de Megève et domaine skiable souverain, son prestige ira grandissant avec ses six villages des trois vallées. Air pur et haut-de-gamme pour ce biscuit de Savoie 5 étoiles, interdit de remontées (acides) comme les autres.

De gauche à droite

Land Rover 88 Serie 2 “Gendarmerie”. Norev. 1969. No. 152

Inspiré à l’ingénieur Maurice Wilks, tête pensante de la firme Rover, par la Jeep Willys, le Land Rover était à l’origine un véhicule rustre et robuste composé de panneaux d’aluminium montés justement sur un châssis Jeep. De surcroit, inaugurant le segment inédit du 4×4 tout-terrain anglais, le Land Rover chahutait singulièrement l’image de Rover, connu pour ses berlines cossues, comme la nouvelle P4, très appréciée par l’establishment.  Présenté en avril 1948 au salon d’Amsterdam, le premier Land Rover fera dix ans durant la joie des gentlemen farmers, des baroudeurs, des explorateurs et des chasseurs, vendu dans tous les pays du Commonwealth et plus encore. Bardé d’un Royal Warrant accordé en 1951 par le roi George VI, Land Rover verra très vite ses ventes décoller : en dix ans, il s’en sera vendu 250.000 exemplaires.

En 1958, un nouveau Land est lancé, a little bit plus large, plus renflé. Nomenclaturé 88 et 109, c’est ce modèle de la Série II, en version pick-up, qui deviendra, dument zébré, la star 4×4 de la série télé Daktari, lancée en 1966. Cette année-là, les ventes mondiales du Land Rover dépasseront les 500.000 exemplaires produits depuis ses débuts. En 1967, Rover et son Land tomberont dans le giron du groupe British Leyland. L’année suivante, afin de satisfaire à la législation américaine, le positionnement des phares, jusqu’à alors placés au centre, très près de la calandre, seront déplacés sur les ailes. C’est ce modèle que reproduira Dinky GB dès 1970 (no. 344) dans une multitude de versions, longtemps après avoir abandonné la reproduction du Land Rover série I, commercialisée en 1954 (no. 340). Chez Corgi Toys, le Land Rover 109 sera de tous les barouds, jusqu’à parader pour le cirque Chipperfields. Toujours plus-plus, Spot-On choisira la version longue, recopiée en plastique à Hong-Kong et en Italie, Mebetoys mettra le 109 à tous les régimes, militaires, policiers, secours et safari.

Chez Norev, si les Anglaises furent bien servies dans leur assiette (Ford, Jaguar, Morris, Triumph, Rolls-Royce…), aucune Rover ne fut mise au catalogue. Et quand en 1969, le roi de la Rhodialite au 1/43ème décida de donner corps au Land Rover, aucun fabricant français ne s’y était encore essayé -Solido le fera beaucoup plus tard. Modèle choisi : le Land Rover 88 en deux moules : pick-up et cabine. Et cinq variantes : Expédition, Dépanneuse, Safari, Ravitaillement et Gendarmerie. Ces Land sont des petites réussites avec nombreux ouvrants, roue de secours sur le capot, accessoires divers, treuil à l’avant. Autant de détails sinon fragiles tout du moins cassants, ce qui hisse aujourd’hui un Land Norev complet au rang du graal. Il y aura aussi une variante militaire, encore plus « graalesque » avec trois Land Rover attelés à des lance-missiles et des lance-roquettes. Également introuvable intact et entier : le coffret SOS Dépannage (ref. CP 2) contenant une Peugeot 504, une ambulance Citroën ID 19, un Land dépanneuse et un Land Gendarmerie.

Modèle devenu une marque en 1978, Land Rover avance aujourd’hui roue dans la roue avec Jaguar au sein de l’entité JLR, propriété du groupe indien Tata Motors. Comme un parfum de revanche post-colonial. Quant au Land originel, depuis un bail, son nom est Defender…

Toyota Land Cruiser FJ-40 “Winter Sports”. Tomica-Dandy. 1983. No. L-14

Réplique nippone à la Jeep, le Toyota Land Cruiser trouve son origine en 1950, en pleine guerre de Corée. Rendu à la vie civile en 1951, le principe de ce véhicule tout-terrain sera développé dans le fil des fifties en devenant le premier modèle Toyota exporté, notamment en Australie, avant d’être produit au Brésil sous le nom de Bandeirante, et au Venezuela, sous le nom de…Macho !. Au Japon, le Land Cruiser ou Rando Kuruza se posera en générique du 4×4 mondial. Commercialisé dès 1965 aux USA, le Toy’ affichera 300.000 exemplaires vendus en 1973. Véritable cheval de Troie de l’automobile japonaise dans le monde, le Land Cruiser engendrera plusieurs générations, puisqu’encore amplement construit et vendu aujourd’hui. Lancée en 1964, la troisième série, celle des BJ-40, dite Heavy Duty, sera produite jusqu’en 1980. Gros rival de Land Rover, rencontrant un succès fou partout dans le monde, ce Toy’ multipliait motorisations, équipements et typologies de carrosseries -ouvertes, fermées, pick-up, courtes, rallongées…

Des pistes impraticables aux étagères des magasins de jouets, le Land Cruiser BJ-40 sera réduit 1/36ème au Japon par Yonezawa-Diapet et, en France, par Majorette, vendu monté ou en kit. L’Italien Polistil choisira lui et le 1/25ème (très réussi) et le 1/45ème (très bâclé). Pour un vrai Toy’ au 1/43ème, miser sur Tomica-Dandy, grand rival de Diapet. Firme de jouets établie depuis 1924, Takara Tomy qui est devenue Tomica en 1970, a lancé deux ans plus tard, la marque Tomica Dandy, ligne de petites voitures en zamac, luxueusement réalisées au 1/43ème avec force détails et décors. Essentiellement basé sur le parc auto japonais, Tomica-Dandy s’ouvrira à l’étranger en 1977 avec la Lotus Europa. Jusqu’en 1993, la production des Tomica-Dandy tiendra la dragée haute aux Diapet, ses concurrentes directes au 1/40ème.  Son Toy’ était proposé en rouge, bleu ou jaune, avec le toit hardtop en plastique blanc (no. 0-13). Capot et portes ouvrants, flopée d’accessoires extérieurs (antenne, treuil…), gros pneus bien larges, le modèle reproduit est exactement le BJ-41V-12CY. Une précision inscrite sur les flancs de la miniature, sortie en 1983, qui sera armée aussi pour la neige avec une version let-it-snow Fujiyama: carrosserie fluo flashy et scooter des neiges sur galerie-toit. N’y manquent que les chaînes…

Peugeot J7 Minibus “Courchevel”. Norev. 1978. No. 248

Sochaux, 1965. La gamme utilitaire du Lion comprend alors la 404 commerciale, le vieillissant pick-up 403, le tout nouveau petit break de service 204, et, remplaçant le rondouillard D4B dit « nez-de-cochon », vétéran usiné depuis 1945, le fourgon J7. Flambant neuf et moderne, traction-avant (comme la 204), charge 1400 kgs, le J7 est doté de portes coulissantes qui, selon la presse un brin égarée rayon sécurité routière, permettaient de rouler grand’ouvertes !. Toutes versions confondues le J7 se vendra à plus de 330.000 exemplaires jusqu’en 1980, affichant, comme son prédécesseur, une vaillante carrière d’utilitaire à tout faire longue de quinze ans, moyennant quelques chiches modifs cosmétiques. Le J7 eut même les honneurs de remplacer l’increvable Type H de Citroën au rayon panier-à-salade de la Police.

Tôlé ou vitré, le J7 sera aussi proposé en livrée « minibus » dès 1965. Volet jouets, il sera amplement reproduit en tôle sérigraphiée par Joustra puis, au 1/43ème, par Dinky-Toys ( Allo Fret, Pompiers, Autoroute). Le fabricant Bourbon mettra aussi un J7 en plastique fragile à toutes les cuvées promotionnelles -Orangina, EDF, Crédit-Agricole, Poclain, Caisse d’Epargne…-, avec ses roues rouges et ses gros pneus blancs. Plastique encore, mais ô combien plus résistant avec Norev qui ne pouvait pas passer à côté du J7. Un J7 qui, à l’inverse de l’Estafette Renault et du Tube de Citroën, ne se déformait pas, genre bosse de zébu. Apparu en 1967 au catalogue, le J7 endossera tous les métiers du service public -PTT, Police, Gendarmerie, Autoroute et affichera une kyrielle de pubs. Tout comme le vrai J7, celui de Norev sera fabriqué jusqu’au début des années 1980. Descendu en qualité dans la série Plastigam avec roues-boutons rapides, en 1978, le J7 descendra aussi l’Ardèche avec une version équipée de kayak. Et s’attaquera aux sports d’hiver avec le modèle Courchevel, doté ou non, de six paires de ski rouges fichées sur le toit. Si encore dans leur boîte et complets, ces deux J7 ont vu leur cote collector atteindre des (petits) sommets.