Son nom était Edwin H. Land. Il était américain, chimiste, inventeur et c’est lui qui au mitan des années 1930, avait mis au point un matériau polarisant qui sera appliqué sur le champ aux métiers de l’optique. Son nom : le Polaroid. Qui dit optique, dit photo. Fondée en 1937 par Land, la société Polaroid s’attachera aux techniques d’un procédé photo à développement instantané et unique, apparu sur le marché dès 1948 et destiné à un usage grand public.Initialement noir/blanc, le film Polaroid passa à la couleur en 1963 et chaque amélioration technique s’accompagnait d’un nouveau modèle d’appareil.
Populaires, maniables, n’exigeant aucune connaissance photo, les Polaroid s’adressaient aux familles, aux jeunes, aux ados, et son procédé de développement en quelques secondes peut, avec le recul, être considéré comme la préhistoire du selfie. Les Polaroid furent aussi happés par la planète mode quand tous les photographes, parmi les plus grands, pré-shootaient avec un Pola pour estimer cadre et composition, leurs séances et séries, en extérieurs comme en studio. De nombreux artistes usèrent aussi du Polaroid comme support évolutif de leur œuvre. Supplanté par le numérique, l’insta Pola a été salement malmené, au point que son fabricant, la Polaroid Corporation, en a abandonné la fabrication, appareils comme films, en 2007. C’était compter sans la force d’une contre-culture visuelle, surgie à Berlin et matérialisée par des magasins Sofortbild, ouverts dans le quartier de Mitte. Sofortbild ou l’image immédiate, là, tout de suite, a relancé la machine en vendant appareils, films Polapremium encore en circulation, livres, tirages, se plaçant ainsi en sauveur avec son Impossible Project de conservation et de relance du système. Gros succès et débouché : en 2017, l’un des associés d’Impossible Project a racheté Polaroid Corporation et l’a rebaptisé Polaroid Originals.
En 1964, suite à la mise sur le marché de ses packs couleur, Polaroid lançait la série des Landcamera Automatic 100. Fabriqué et commercialisé entre 1965 et 1967 à plus de 1.4 million d’exemplaires, l’Automatic 104 embarquait dans son boîtier plastique une optique deux lentilles, un image sizer et un flash comaque. Vendu en France 399 francs, l’Automatic 104 bénéficia d’une généreuse publicité imagée famille et d’un argument promettant « une épreuve bien contrastée, bien piquée dans tous les détails ». Bien que conçu pour le pack couleurs de dix poses, le 104 fonctionnait aussi bien avec un pack noir/blanc. Il suffisait alors juste de 10 secondes pour développer insta le cliché contre 60 secondes pour la couleur. Un record quand le développement d’une photo couleur Kodak ou Agfa réclamait 60 heures !. Le problème du Pola, c’était qu’il était unique. Et que rapidement, les couleurs bavaient un chouia. Schtlaaak ! Vrzzzzz…Zut, mémé a encore des yeux de lapin !. Merci pour la mémoire. L’autre handicap du Pola était sa présence physique soudain repérable. Le flash du 104 qui évoque ici celui des reporters de presse des années 1950 ne valait rien dans une cohue de paparazzi à l’arrivée d’une star à une première. Le Pola ne valait rien non plus dans les planques au téléobjectif pour paparazzer un people incognito. Schtlaaak ! Vrzzzzz…On l’entendait à vingt mètres !. Tout cela n’a pas embarrassé Lady Gaga qui a joué les Art Directors de la marque de 2010 à 2014. Ni avant elle, les Spice Girls auto-polarisées pour la promo de leurs clips. Au moins, pendant ce temps-là, elle avaient les mains bien occupées…
De gauche à droite
De Soto Fireflite. Dinky Toys GB. 1958. No 192
Créée ex-nihilo en 1928 par Walter Chrysler, la marque automobile De Soto se référait nommément au conquistador espagnol Hernando de Soto qui écuma les mers au milieu du XVIème siècle et dont le haut-fait consista à conquérir les territoires alors inconnus d’Amérique Centrale et d’Amérique du Sud. Cinq siècles plus tard, ce que Walter Chrysler entendait conquérir, c’était le marché automobile moyen-de-gamme nord-américain avec des voitures distinctes des Chrysler. Rivales avérées et visées : Studebaker et Oldsmobile. Nonobstant, fidèle à ses habitudes, Chrysler ne pourra s’empêcher d’installer et attiser une concurrence interne en absorbant cette même année 1928 le constructeur de camions Dodge, très vite versé dans un registre auto, placé exactement face à De Soto qui devra affronter plus tard la concurrence des Plymouth, autre marque fondée, toujours en 1928, par Walter Chrysler et ciblant un créneau plus populaire. Jolies voitures plaisant au public américain, les De Soto portaient des noms ronflants -Airflow, Airstream, Firedome, Diplomat, Adventurer- et leur style accompagnait parfaitement chaque époque, collant impeccablement aux styles et codes esthétiques qui se succèderont depuis les années 1930 jusqu’aux années 1950. À New-York, la plupart des Yellow Cabs étaient des modèles De Soto. À partir de 1955, la marque entama un déclin provoqué par plusieurs facteurs dont, sus évoqué, le cannibalisme interne au groupe Chrysler et favorable à Dodge et la crise économique de 1958 qui fera fondre son réseau de concessions dédiées. De fait, l’ultime De Soto, une NewPort ’61, sortira des chaînes en 1960 et la marque finira quickly au cimetière des belles américaines sacrifiées sur l’autel de la rentabilité. Il existait aussi une branche « camion » De Soto, active depuis 1937, vendue en Argentine, en Espagne et en Turquie où la firme Askam récupèrera nom et production en 1978 après que Chrysler y ait mis un point final en 1970. Avec la Fireflite, lancée en 1955, De Soto tenait son navire-amiral, un V8 avec carrosseries berline 2 ou 4 portes avec ou sans montants, coupé hardtop Sportsman, cabriolet et station-wagon. Assemblée dans les usines de Los Angeles, la Fireflite connaîtra plusieurs face-liftings jusqu’en 1960 et décrochera même l’insigne honneur de placer en 1956 un cabriolet en pace car sur le circuit d’Indianapolis.
Sur le champ de la miniature, les De Soto furent singulièrement snobées par les fabricants de jouets. RS Toys, Natty Toys et Azrak aux USA pour quelques rares modèles d’avant-guerre ou de la toute fin des années 50, sinon, bien plus tard, au niveau de la collection, Franklin Mint, Brooklin Models, Vitesse avec l’immense De Soto De Luxe 1947, ou encore, plus récemment, Kess et Autocult. Très similaire aux Chrysler de même gabarit, la Fireflite sera reproduite en miniature, en Europe, par Dinky Toys GB, ici penché sur la version 1958. Proposée en deux livrées -gris clair/rouge et turquoise/beige rosé-, avec ou sans vitrage, avec ou sans suspensions, la Fireflite sera doublée en 1960 d’une version Police USA avec robe noire, portières avant blanches, gyrophare rouge et antenne en plastique (no. 258), première d’une série de quatre américaines « policées » à Liverpool : Dodge Royal, Ford Fairlane et Cadillac 62. En 1959, Dinky Toys France affichera aussi sa De Soto en catalogue, en l’occurrence, une Diplomat (no. 545), reproduction d’une gamme-modèle réservée à l’export (Amérique du Sud, Afrique du Sud, Australie), dont l’Europe avec chaînes d’assemblage en Belgique.
Mercedes-Benz 300 SL Roadster. Tekno 1960. No: 925
Ce fut le cabriolet Mercedes le plus spectaculaire et aussi le plus cher de son époque. Avec son design bestial signé Friedrich Geiger qui dessinera plus tard la titanesque 600, le roadster 300 SL tapait 240km/h avec l’aisance d’un jet et fera trépigner les stars hollywoodiennes comme les playboys européens. La 300 SL était une côte d’Adam de l’icônique 300 Gullwing ( portes papillon) présentée avec clameur à New-York en 1954. Une voiture qui fera les délices du gotha de l’époque, commandée et conduite par Ali Khan, le Shah d’Iran, le roi Hussein de Jordanie, Fangio, Herbert Von Karajan, Juan Peron, mais aussi par Tony Curtis, Clark Gable, Sophia Loren, Curd Jürgens, Horst Buchholz, Steve Mac Queen ou encore le fameux Porfirio Rubirosa.
La 300 SL devait en effet son existence à l’insistance de Max Hoffman, l’importateur de Mercedes-Benz aux USA, qui réclama aux huiles de Stuttgart un cabriolet extrapolé de la Gullwing, mais tout autant performant qu’opulent. Clientèle ici visée : les riches Californiens. Pour être précis, ce n’est pas un cabriolet mais deux, qui seront ainsi étudiés, produits et commercialisés : la 300 SL roadster et la 190 SL, plus petite et plus abordable. Car la 300 SL coûtait un bras, un rein et un œil : deux fois et demie plus chère qu’une Jaguar XK140 !. Dévoilés en 1957 au Salon de Genève, les deux cabriolets rencontreront un succès fou et se hissent aujourd’hui encore, au pinacle des désirs et des cotes collectors, en hausse de 167%. En 2014, la 300 SL de 1958 ayant appartenu à Natalie Wood qui l’avait commandée en rose, était estimée 1, 75 million de dollars. En 2018, chez Artcurial, à Paris, une 300 SL de 1963 a été adjugée 3, 143 millions d’euros, record mondial absolu !.
Produite à 1858 exemplaires entre 1957 et 1963, la 300 SL tracera sa route sur le champ de la miniature. Hormis les frictions japonaises hors échelle, au 1/43ème, elle jouera des roues avec la 300 Gullwing (Quiralu, Märklin) et avec sa petite sœur 190 SL (Dinky Toys, Solido, Märklin…). Outre Corgi Toys et le Français Clé avec leur doublette cabrio/coupé hardtop au 1/48ème), le seul vrai beau 300 SL Roadster sera celui du Danois Tekno. Une splendeur au vrai 1/43è, pesant son poids de métal (150g), intensément luxueux, avec son hardtop en plastique noir, ses capot et coffre ouvrants, son pilote au volant, ses chromes, ses roues à flancs blancs, sa roue de secours…. Plus tard, le moule Tekno sera recyclé chez l’Espagnol Joal, en même temps que celui du cabriolet 230 SL, ces deux « replicas » paella étant diffusées jusqu’à la fin des années 1990. Quant à la gamme de couleurs de la 300 SL Tekno, elle était chatoyante avec notamment un vieil or métallisé des plus glamour et des plus rares. Vendue en Europe dans son étui carton illustrée, la 300 SL était diffusée aux USA sous blister et sous la marque Tekno Toys.
Cadillac 62 Sedan V8. Tootsietoy. 1959-60. No. 1472
Immenses, gigantesques, palatiales: les Cadillac ne passaient pas inaperçues et encore moins en Europe où leur standing supraméricain valait pour trophée social bordé de millions. Oumph-cars par excellence, les Cadillac étaient sans rivales ou quasi. Seules les Packard et les Lincoln pouvaient les titiller sur le podium du luxe. Fondée à l’aube du XXème siècle, rachetée par la General Motors qui fourguera ensuite Lincoln à Ford, la marque Cadillac est sans doute celle qui a le plus impacté la pop-culture américaine. De Brand New Cadillac de Vince Taylor en 1959 à Pink Cadillac de Bruce Springsteen en 1984 via le Cadillac Walk de Mink De Ville en 1977 pour exemples. Musique encore avec le label anglais Cadillac Records, fondé en 1973 et avec le biopic du même titre, tournant autour du duo-fondateur du mythique label de rock Chess Records, incarné par Adrien Brody et Jeffrey Wright. Au cinéma, les Cadillac, à l’instar des Rolls, sont parmi les autos les plus vues. Juste un film, pour citation : Pink Cadillac, avec Clint Eastwood et Bernadette Peters, sorti en 1989. En France, il y eut même une actrice-chanteuse qui prit le nom de Cadillac pour faire carrière : Rita Cadillac fut une starlette des sixties, ancienne danseuse du Crazy Horse et pour qui l’expression gotlibienne « mâtin, quel châssis » semblait avoir été inventée. Sa filmographie en revanche relevait plus du répertoire Simca 1000 de série B à Z.
Avare en noms de baptême dorés sur tranche, Cadillac a toujours procédé par séries numérotées -60, 61, 62, 75…- quitte à ce que ce numéro finisse par se confondre avec le millésime. C’est ce qui arriva dès 1960, d’où gros mic-mac modèle/année, en particulier avec la série 62. Une série apparue dans la gamme en 1940 et achevée en 1964 après sept générations de modèles. C’est de la série 62 que surgiront à la fin des années 1950 les ailerons hallucinants et stratosphériques qui feront ressembler les Caddy à des fusées rockétées par la science-fiction hollywoodienne, le millésime 59 étant ici le plus délirant. Le suivant (61-64) sera plus sobre et c’est cette Cadillac 62 Sedan (berline) que reproduira la firme anglaise Lone Star au 1/50ème, échelle somme toute raisonnable vu le gabarit excessif de la bagnole et pour qu’elle ne devienne pas une arme de poing dans la mimine d’un bad boy vindicatif. Fabricant de jouets passé à la little voiture en 1955, Lone Star reste connu des collectionneurs pour ses deux séries lancées dans les années 1960 : Impy et Tuf Tots, respectivement au 1/66è et au 1/85è. Commercialisée à la fin des années 1950, la série Roadmaster au 1/43ème comportait des modèles anglais qu’aucun autre fabricant avait daigné reproduire, comme la Daimler Conquest ou la MG série FT. À l’orée des années 1960, Lone Star et le fabriquant américain Tootsietoys nouèrent un partenariat inédit consistant à miniaturiser au 1/50ème une série d’américaines, sous fanion Roadmaster, qui seront vendues en Europe sous la marque Lone Star et aux USA comme des Tootsietoys. À la seule différence que les Lone Star étaient autrement plus fidèles, mieux finies et équipées que les Tootsie, par essence rudimentaires. Il y aura donc une douzaine de références communes dont la Chevrolet Corvair, la Dodge Dart Phoenix, la Ford Sunliner, la Nash Rambler Rebel et cette Cadillac 62 Sedan V8, toutes différenciées par leur seul socle, avec indice de grosse rareté en faveur des Tootsietoys. Le millésime suivant de la 62 sera reproduit par Dinky Toys GB au 1/48ème et par Politoys, en plastique, au 1/42ème avec pléthore d’ouvrants. Pour une repro au 1/43ème de la Cadillac 62 de 1959, il faudra patienter jusqu’aux années 1990 en mettant une main sur celles reproduites par Vitesse et par Dinky-Toys/Matchbox, histoire de faire entrer Elvis et Jayne Mansfield dans la vitrine…