CASINO ROYAL

Monte-Carlo, Deauville, Biarritz, Nice, Cannes. Pas un spot aristo-mondain sans son casino, en France comme en Italie et partout dans le monde. Terrain de parade des joueurs de la planète, auxquels s’agrègent autant d’aventuriers, croqueuses de diamants, escrocs, voleurs, merlans et autres margoulins du tapis vert, le casino est également le grand bonneteau du cinéma. Faire sauter la banque et aussi les coffres-forts sans oublier de ratiboiser la jonquaille arborée par ces dames, pas toutes blanc-bleu niveau mœurs. À Hollywood, le tropisme s’est naturellement fixé sur Las Vegas. Un peu moins Reno, un chouia ploucard au regard du beauf US. Il y a aussi Atlantic City. Louis Malle y avait tourné un superbe film crépusculaire avec Burt Lancaster, Susan Sarandon et Michel Piccoli (Atlantic City-1980).

Dès le Muet, les casinos ont exercé une ciné-fascination sulfureuse. En 1922, le très mégalo Erich Von Stroheim reproduisait en studio les décors extérieurs et intérieurs du casino de Monte-Carlo pour les besoins de Folies de Femmes, super-production ruineuse où, des actrices principales -jouant des fausses princesses russes-, jusqu’aux moindres figurantes, toutes portaient des culottes en soie et se gavaient de vrai caviar. À Cannes, le casino du Palm Beach fut un décor choisi du cinéma, notamment dans Mélodie en sous-sol, tourné sur place en 1963 par Henri Verneuil avec Jean Gabin et Alain Delon. Et aussi Dora Doll en fausse comtesse russe ( un cliché increvable du genre !) tapinant au bar. Posté à la Pointe Croisette, le Palm Beach est inscrit, scintillant, dans la légende cannoise du XXème siècle. Bâti dans un style hispano-mauresques alors très en vogue, inauguré en 1929, l’établissement, géré par la Société Cannes Balnéaire, abritait outre son casino d’été, un sporting-club avec immense piscine découverte, hammam, cent cabines et un personnel tiré à quatre épingles. Son architecte, le Niçois Roger Séassal, réalisait cette même année 1929 le Monte-Carlo Beach de Roquebrune Cap-Martin. Galas, soirées caritatives dorées sur tranche, évènements liés au Festival de Cannes : le Palm Beach faisait donc le plein de joueurs en été, quand le casino d’hiver, érigé en 1907 baissait pavillon saisonnier. Un casino d’hiver fermé et rasé en 1979 pour faire place à l’atroce bunker du Palais des Festivals. Toujours hérissé de ses piques mauresques, le Palm Beach traversera le XXème siècle avec faste jusqu’au déclin survenu à l’orée des années soixante, quand la Croisette, réaménagée, permit aux palaces de posséder leur plage privée. Avoir ses aises balnéaires, cabine incluse, au Palm Beach devint soudain du dernier tocard. Mieux valait le fréquenter de nuit quand Régine et autres nababs noctambules en firent un spot de bambocheurs internationaux. À la suite du groupe casinotier Partouche, le groupe Barrière tentera l’aventure en rachetant le Palm Beach. Pour le revendre fissa aux…Partouche !. Re-clap de fin en juin 2017 avec un Palm Beach vidé de ses jeux mais pas totalement de sa légende. Sur fond de propriété foncière et de bail emphytéotique partagée entre les 1600 co-propriétaires des appartements et maisons de la Pointe Croisette autour du Beach, l’établissement est tombé dans l’escarcelle de la famille Madar, poids-lourd de l’immobilier de luxe à Paris et qui possède déjà le Port Palace à Monaco. Annoncée pour 2022, la résurrection du Palm Beach avec rénovation fastueuse de la fameuse piscine, aménagement d’un nouvel hôtel et ouverture de cabarets, night-clubs et autres lieux de divertissement, sans rien altérer au style architectural originel. Mais toujours sans aucun jeu. La mélodie se jouera dès lors au soleil.

De gauche à droite

ROLLS-ROYCE SILVER CLOUD. SOLIDO 1957. No/ 506 puis 115

C’est sans doute la Rolls la plus vue au cinema, et ce, encore longtemps après qu’elle ne soit plus fabriquée. Les Grande familles ou Le gentleman d’Epsom avec Gabin, L’ours et la poupée avec Bardot, Alfie le dragueur avec Michael Caine, 7 fois femme de Vittorio de Sica avec Shirley Mac Laine, Appelez-moi Mathilde avec Jacqueline Maillan, Plaza Suite avec Walter Matthau…Autrement, dans La Rolls-Royce Jaune, film anglais à sketches avec Ingrid Bergman, Alain Delon, Jeanne Moreau, Rex Harrison, Omar Sharif, la RR en question était une Phantom II de 1931.

Présentée en 1955, la Silver Cloud remplaçait la très datée Silver Dawn sortie en 1949 et qui fut un échec cuisant avec 760 exemplaires péniblement vendus. De fait, la Silver Cloud symbolisait la première Rolls « moderne » de l’après-guerre. Jumelée à la Bentley S, altière, majestueuse et fluide à la fois, sa silhouette longue de 5,40m. en imposait, autant que son nuancier de couleurs bitons du plus élégant effet. Promue voiture des stars, produite jusqu’en 1966 au gré de trois séries, remaniée stylistiquement avec la discrétion d’une lady bien élevée picorant les liftings, la Silver Cloud sera proposée en limousine, en cabriolet, plusieurs carrossiers dont Mulliner et Hooper, participant à ce bon aloi pesant plus de deux tonnes sur la balance. Si la série I (1955-1959) filait jusqu’à 165 km/h, la série II montera jusqu’à 183 km/h et la série III, apparue en 1963 se distinguait par ses double-phares. Vendue à près de 6800 exemplaires, la Silver Cloud cèdera le pavé à la Silver-Shadow tandis qu’intercalées entre les deux, les Phantom V et VI qui plaisaient tant aux Beatles, étaient des Silver-Cloud rallongées  qui feront passer respectivement 516 et 374 clients à la caisse.

À l’échelle ludique du 1/43ème, la Rolls-Royce Silver Cloud occupera notamment les Anglais Spot-On, Lone Star, Dinky Toys GB, le Français Quiralu (version Hooper), et même les Italiens Mercury et Ingap (en plastique), mais la plus belle reste celle reproduite par Solido en 1957. Initialement disponible en version démontable et unicolore, la Silver Cloud intégrera la série 100 avec peinture bicolore aux nuances subtiles, vitrage, aménagement intérieur et suspensions aussi moelleuses que celles de la vraie. Seul hic : l’absence délibérée du Spirit of Ecstasy, la mascotte ailée juchée sur le sommet de la calandre. Quelques années plus tard, Verem récupèrera le moule Solido originel pour une Silver Cloud aux couleurs inédites et arborant une mascotte démesurée!.

CHRYSLER WINDSOR. CIJ. 1956.

No. 3-15

Née du jouet animé en tôle à l’orée du XXème siècle, rebaptisée Compagnie Industrielle du Jouet (CIJ) au début des années trente, CIJ aura abordé l’automobile en produisant sous accord les Jouets Renault. Après-guerre, la firme passera au zamac en lançant ses premiers modèles au 1/43ème dès 1950. Au programme, des Renault (4CV, Frégate, Étoile Filante, Dauphine, Prairie, Savane, Colorale…), évidemment, mais aussi des Panhard (Dyna Junior, Dyna X, Dyna Z) ou encore la De Rovin cabriolet que nul autre fabricant daignera faire figurer à son catalogue. Entre 1953 et 1955, CIJ s’extirpe du marché franco-français en jetant son dévolu sur des modèles étrangers dont la VW 1200, la Mercedes-Benz 220 « Ponton », et surtout un doublé de deux américaines : la Chrysler Windsor et la Plymouth Belvedere. Quatre combinaisons de couleurs élégantes, pneus blancs et chromes argenté : les deux « géantes » sont ici réduites au 1/45ème. Pour la Windsor, CIJ a choisi le millésime 55-56, celui restylé par Virgil Exner et porteur du fameux Power Style. Succès fou : cette Windsor-ci représentera plus de 65% des ventes. Inaugurée en 1939, la gamme Windsor perdurera jusqu’en 1961, passant par tous les styles, excès compris et multipliant les versions -Newport, New-Yorker, Town&Country, St.Regis…-, selon les typologies (coupé, berline avec ou sans montants, cabriolet, break…). De fait, la Windsor 55 fait montre d’une étonnante sobriété et d’une remarquable fluidité de ligne, ce qui expliquera sans doute son succès en Europe où la Volvo 122 Amazon partage son design de calandre séparée. Et, où, même le prince Rainier de Monaco la placera, robe noire et chromes rutilants, dans son écurie automobile entre une Cadillac et une Rolls Silver Cloud, justement…En bulles et bédé, la consécration viendra par Hergé qui la fixera en jaune avec toit mastic dans L’Affaire Tournesol, paru en 1956. Un an plus tard, changement total de registre avec la nouvelle Windsor roulée dans un Forward Look délirant, ce qui ajoutera au laconisme et au classicisme muséal de son aînée. 

Outre CIJ, Dinky Toys reproduira une Windsor 55 en version cabriolet New Yorker. Là où les Windsor des générations précédents furent abondamment reproduites aux USA, notamment par Tootsietoys, celle de 55/56 restera bizarrement circonscrite au marché français. Ce qui en forge toute la singularité. Sinon, le fabricant artisanal Saint-Hubert propose de nos jours en dix exemplaires chacune et sous label Automic Toys, une Windsor base CIJ transformée en taxi jaune new yorkais ou en police car NYC.

ASTON-MARTIN DB4.  CORGI TOYS. 1960. No. 218.

Fondée en 1913, la marque anglaise Aston-Martin était dédiée aux voitures de sport. Établie en 1906, Lagonda visait plutôt le grand luxe. Rachetées en 1947, les voici sous l’ambitieuse férule de Sir David Brown, industriel ayant succédé à son père et à la tête d’une belle fortune et d’un gros business de tracteurs agricoles. Devançant Ferruccio Lamborghini sur cette même lancée, du tracteur au bolide décoiffant, Brown mettra le paquet sur Aston-Martin avec des coupés GT de luxe venus agacer et surpasser Jaguar. Dénommées d’après ses initiales, DB, ses voitures, puissantes et désirables, séduiront play-boys, stars de cinéma et champions de tout poil. On la verra dans plusieurs films dont Doctor in Love, avec Michael Craig (1960), That Riviera Touch, comédie anglaise avec le duo Eric Morecambe/Ernie Wise ou encore Phaedra, de Jules Dassin (1966) avec Melina Mercouri, Anthony Perkins et Raf Vallone. Dévoilée en 1958 et produite à 1210 exemplaires jusqu’en 1963, la DB4 couvait un 6 cylindre ravageur et passera à 250ch. avec la Vantage. Coupé ou cabriolet, silhouette reconnaissable entre mille, la DB4 évoluera jusqu’à la série 5. En 2016, lors du salon Rétromobile,  Artcurial adugera un cabriolet DB4 de 1963 pour la bagatelle de 1.473.000 euros. Apparue chez Corgi Toys en 1960 entre la Fiat 1800 et la Chevrolet Impala, l’Aston-Martin DB4 était proposée en jaune/intérieur rouge et en rouge/intérieur jaune. Un vrai nain…jaune !. Capot ouvrant, roues à rayons et phares peints argent : le coupé sera rejoint en 1962 par une version compétition bicolore vert menthe/blanc (no. 309) dotée de phares diamantés. Produite jusqu’en 1965, la DB4 sera remplacée par la DB5 James Bond, surgadgétisée et reproduite à deux échelles (1/45 et 1/32). Face à Corgi, une seule concurrente : la DB4 de Solido, lancée en 1960 (no. 111) et vite dédoublée par la DB4 Vantage (phares modifiés ; no.130) qu’on retrouvera chez Solido/Buby, Solido/Dalia et dont le moule finira sa carrière chez Verem sous le nom de DB5. Sinon, chez Dinky GB, après la DB3 S de 1957, il y aura un cabriolet DB5, sorti en 1965 puis un coupé DB6, apparu en 1967. Spécialiste des coupés anglais de luxe (Bristol, Jaguar, Jensen…), Spot-On n’ira pas plus loin qu’une DB3 de 1957. Quant aux Italiens qui auraient pu reproduire à l’envi les DB4 carrossées par Zagato ou Bertone, seul Politoys M osera le prototype Touring de 1969, de grossière facture, et produit en vrai à seulement deux exemplaires.