FINA IN FINE

Avec Antar, Elf, Caltex, Valvoline et autre Mobilgas, le paysage pétrolier à la pompe s’est évaporé. À croire que la nostalgie est plus volatile qu’un éther de pétrochimie. Fina relève de ce catalogue de souvenirs routiers basculé dans le pur souvenir. C’est en 1920 que fut fondée la Compagnie Financière Belge des Pétroles. Siège : Anvers. Autour de la table, des huiles bancaires et des affaires : les frères Hector et Fernand Carlier, Auguste Diagre et Aloys Van de Vyvere, ministre de son état. Comme l’adresse télégraphique de la dite-compagnie était « Petrofina », le nom restera et Fina claquera au vent au bord des routes.

Détailler les arcanes de la société, créée sur les bases de plusieurs sociétés de pétrole roumaines et associée avec des Américains du Delaware, reviendrait à tenter de décortiquer un atome, aussi passerons nous sur les circonvolutions financières, fiscales, nationales, internationales qui secoueront la firme , laquelle sera vendue à l’aube du XXIème siècle à Total qui, tout comme Elf, la fera disparaître, pour se concentrer sur ce que ces marques pétrolières savaient faire de mieux quand on était un enfant dans les années 1960 : les cadeaux. À l’instar des autres enseignes carburant aux goodies, Fina sut régaler les têtes blondes qui trépignaient sur la banquette arrière de la 404 alors que papa faisait le plein. Du simple porte-clé jusqu’à la série des Mini de chez Corgi, Fina damait le pion à Elf, à Shell, BP, Total, Antar et Esso. D’autant que Fina roulait en camions citernes miniatures reproduits par Majorette, Sésame ou encore Mira. « Avec Fina, on ne finasse pas » clamait tonton Édouard qui dirigeait une station Fina à Marseille. Du coup, les cadeaux, on les avait comme s’il en pleuvait. Gros souvenir de la bouée Fina qui ne résistait pas à une journée de plage aux Lecques, mais c’était toujours mieux que celle des mauviettes qui ne savaient pas nager et qui barbotaient avec leur bouée à col de canard. Le nadir de l’horreur était celle des filles avec le col de cygne. Ayant appris à nager avant de marcher, la bouée, je m’en tapais comme de l’an 40. En revanche, avec ma flopée de cousins, on se faisait des batailles navales « assis » dans une bouée noire, en fait les chambres-à-air des Jeep de l’armée. Notre dealer, c’était l’oncle Toussaint, militaire basé à Toulon. Nantis de notre bouée noire, on snobait les pécores en bouée promotionnelles ou achetées au bazar de la plage. Qui aurait dit que cet objet flottant censé nous maintenir à la surface de l’eau deviendrait un vecteur de distinction qui nous hissait au-dessus-du lot ? Comprendre cet attirail du plagiste junior essentiellement composé de la sainte trinité seau-pelle-râteau et, humiliation suprême, des brassards gonflables. En grandissant, pour beaucoup, la bouée sera troquée par le matelas pneumatique bicolore et tout autant « crevable ». Surtout après l’avoir pris d’assaut à cinq en hurlant. L’avantage caché de la bouée noire/chambre-à-air était qu’elle n’était pas galvanisée, soudée avec ce filet central coupant et que si elle crevait, basta la rustine et banzaï ! Sur les bouées Fina, quand elles crevaient, les rustines ne tenaient pas. Le seul fait de râper un chouia la zone à rustiner provoquait une autre crevaison. Uffaaaaa !, une vraie cagade !. Comme c’était gratuit-offert, on ne pouvait pas réclamer. Et tonton Édouard nous consolait avec des porte-clés. Je les ai toujours. Increvables…

De gauche à droite

PEUGEOT 404. NOREV. 1962. No. 51

Anguleuse et rieuse, la nouvelle berline lancée par Peugeot à l’orée des années soixante était inscrite au catalogue de l’avenir radieux. Née au cœur des Trente Glorieuses, la 404 remplaçait la 403, démodée mais indestructible. Signée Pininfarina, sa ligne était jumelée avec celle de la Fiat 1800/2100/2300 et, encore plus, avec celle de l’Austin 110 Westminster. Moderne, spacieuse, élégante, dotée d’un pare-brise panoramique et d’ailerons arrière en angle vif, la 404 affichait un immense sourire avec sa calandre inclinée comme les dents de Jackie Kennedy. À l’époque, c’était le chic du chic. Lisse et pure, sa silhouette induisait aisance et confort. Grande berline familiale et routière, la 404, si elle ne concurrençait pas directement l’ID 19, périma de facto la Simca Ariane vieillissante, tout en proposant dans une foulée rapide un coupé, un cabriolet et un vaste break 7 places. Produite de 1960 à 1975, la 404 misa à ses débuts sur un pari osé pour le lion de Sochaux : sortir en ville en robe orange tango. Une audace insensée vite tempérée par une gamme un cran plus traditionnelle de beige, blanc crayeux, bleu ciel et vert amande. Classée 9 CV, tapant plus de 160km/h, propulsion carburant essence, diesel ou injection, la 404, tous modèles confondus, se vendra à plus de 2,8 millions d’unités, dont 1,67 million pour la seule berline. Son apogée commercial se produira en 1965 et 1966 avec plus de 160.000 exemplaires par an. Emblématique d’une époque, symbolisant un haut-de-gamme somme toute relatif, la 404 évoluera esthétiquement par touches homéopathiques : dissimulant la trappe d’essence, la plaque d’immatriculation arrière sera rehaussée de quelques centimètres tandis que, de ronds, les catadioptres deviendront rectangulaires. Même traitement en proue avec une modif du volume des clignotants positionnés sous les phares. Remplacée par la 504 tout en poursuivant une carrière plus économique et plus utilitaire, la 404 fera son intéressante dans les rallyes du bout du monde, notamment en Argentine.

Sur le tapis du salon, les petits garçons eurent en revanche l’embarras du choix : réduite au 1/43ème, la 404 fut reproduite massivement par Dinky Toys ( Junior+toit ouvrant), plus ponctuellement par JRD, et avec parcimonie par Quiralu/Eria. À des échelles moindres, on recense une 404 chez Majorette, une 404 très exotique chez l’Argentin Buby et à des échelles nettement supérieures, une 404 chez Joustra et une, franchement superbe, chez France-Jouets. Entre les deux, Salza en fera rouler une au 1/40ème et aux couleurs du Tour de France, et Cofalu, la même en plastique.  En plastique, il y aura Minialuxe (totalement ratée), Clé (idem)/ERF, Panda, Falk (plastique soufflé) et bien évidemment Norev qui lui aussi rata son coup avec un moule manqué et qui, en dépit d’une longue production, ne lèvera jamais le petit doigt pour en corriger les navrants défauts dont une calandre trop étroite, un pavillon trop épais et des feux arrière inclinés et plats, voire incurvés ! Illico sortie avec un avantage notable, la Norev arborait donc un toit ouvrant coulissable et facilement cassable en appuyant trop fort dessus, quand il ne se coinçait pas de travers. Bref, se voir offrir une 404 Norev était vécu comme une punition. Pire : une honte. Norev aura beau lui coller une caravane Digue, ça ne changera rien à l’affaire. Un copain d’école dont le père possédait une 404 bleu marine en avait collé une jaune anis au-dessus de la boîte à gants. Mon père qui roulait en 404 vert bouteille intérieur tabac m’avait interdit de faire pareil alors que cela ne m’avait même pas effleuré. C’est dire la croix qu’on portait à cause de cette Norev de malheur ! Elle avait beau arborer des pneus à flancs blancs, des roues avant qui tournaient grâce à la servo-direction, la 404 Norev ne nous plaisait pas. Na !. Initialement produite en belle Rhodialite, curieusement écartée du programme Cométal/Jet-Car, la 404 finira sa carrière moulée dans le plastique cheap du Plastigam et dotée de roues rapides anachroniques. Autour de la berline, Norev avait multiplié les versions avec un beau coupé, une familiale et pick-up bâché très réussis, eux. Cinquante ans plus tard, si une vraie 404 ancienne se monnaye autour de 5500 euros, une 404 Norev en bel état est devenue un collector traqué coté autour de 50 euros. Sic transit gloria little voiture.

VOLKSWAGEN 1600 TL FASTBACK. DINKY-TOYS GB. No. 163

Après quinze années d’une culture mono-produit seulement ponctuée par la sortie du coupé Karmann-Ghia et celle du Kombi (Typ 3), Volkswagen planche sur l’idée d’une berline moderne. Si la base mécanique reste celle de la Coccinelle (Typ 1) avec moteur arrière 4 cyl. refroidi par air, le design de la nouvelle Typ 3 tranche dans le vif. Tri-corps, la ligne est celle d’une berline 2-portes (coach). Dévoilé au Salon de Francfort 61, la nouvelle VW 1500 fait hurler les puristes qui y voient une Cox dénaturée digne de tous les mépris. Chez VW, on s’en contrefiche : la 1500 a été conçue pour le marché US et pour tailler des croupières à la Chevrolet Corvair. En France, c’est la R8 qui rivalisera avec cette fausse berline rapidement doublée d’un break Variant, lancé en 1962 tandis que le projet de cabriolet restera dans les tiroirs. Ein bisschen popotte, la 1500 se vendra à plus de 2,5 millions d’exemplaires dans le monde, poussant les fabricants de miniatures à s’aligner sur le créneau du 1/43ème -Tekno, Norev, Dinky GB, Politoys, Gama, Kaden, Dux, laissant à Märklin, Politoys Export et à Spot-On le soin de s’occuper du break Variant. C’est la montée en puissance du moteur, passé de 1500 à 1600 qui poussera VW à extrapoler le coupé 1600 TL fastback, présenté en 1965. Avec retour au look de gros insecte vibrionnant. Produit jusqu’en 1973 nonobstant un lifting opéré à la charnière des années 69/70, le coupé fastback, toujours inscrit comme Typ 3 sera doublé dès 1968 par les curieuses et lourdasses 411/412 (Typ 4), signées Pininfarina, sans doute un jour de grande fatigue. Ultimes VW à moteur arrière, les 411/412 seront remplacées par la Passat, dessinée avec maestria, et comme la Golf, par Giugiaro. À l’instar de la 1500, le tout-joujou reproduira la 1600 TL comme un seul homme : Norev, Gama, Mebetoys, Matchbox et Dinky Toys GB. Robe rouge, nombreux ouvrants, phares diamantés : la 1600 TL fastback dépassait le 1/43ème de quelques degrés, avec volant à gauche et pare-chocs moulés en zamac brut avec le châssis. On ne lui connaît pas d’autres versions (rallye, etc…) et d’autres couleurs, si ce n’est quelques variantes dans le rouge. On peut toujours se tromper, nein ? Sinon, s’offrir une vraie 1600 TL état collector pour 12.000 euros.

TOURING CARAVANE. JOAL. No. 159.

Avec la remorque-bateau, la caravane est l’accessoire complémentaire de tout attelage au rayon des tutures miniatures. Tous les fabricants, toutes les marques, se sont pliés au jeu de la roulotte du XXème siècle et du camping en coffrets ou vendue en solo comme chez Dinky ou chez Tekno. Que ce soit chez Solido, Norev, Politoys, Tootsie Toys, Spot-On, Minic, Märklin, Gama, Clé, Mercury, CIJ, la caravane suit le mouvement avec aménagement intérieur, toit transparent et autres gadgets. Chez Corgi où l’on préfère les voiliers, les hors-bords, le surf, le golf, on boudera longtemps la caravane. Il faudra attendre le mitan de seventies pour en voir une tractée par une Mercedes 240D, avec à la clé, un souci d’échelle : la Mercos était au 1/36ème et la Touring Caravane au 1/43ème. Comme on n’attrape pas les flies avec du vinegar, l’attelage ne fera pas long feu au catalogue et Corgi fourguera fissa sa caravane à l’Espagnol Joal. Moyennant un changement de roues et de plaque minéralogique, il s’agit strictement, dehors-dedans, du même modèle, tracté dans le cadre du coffret no.150 par un coupé Iso Rivolta GT, lui-même réplica de l’original Politoys-M made-in-Italy vieux de quinze ans et recyclé en terre ibère jusqu’au début des années 90. Le succès, c’est de durer…